Les
années d'Occupation
1940-1944:
survivre et résister
Bref article qui donne le cadre général
de ces années en renvoyant à plusieurs pages de ce site...
Démobilisé,
Jean Bruller rejoignit sa femme, ses enfants et sa mère
à Montcharente à l'été 1940. Il aurait pu rester dans
la zone sud, mais il préféra revenir dans sa maison
de Villiers-sur-Morin. C'est ce qu'il fit début août
1940 dans sa vieille Ford qui rendit l'âme devant la
grille de sa demeure.
Décidé à ne
plus rien publier, il se laissa deux mois avant de trouver
une solution professionnelle:
"J'avais d'ailleurs devant moi un pécule
modeste, suffisant néanmoins pour me donner le temps
"de me retourner".
Il passa son
mois de septembre à défricher son jardin, à prévoir
la survie de la famille: planter, élever des volailles,
fabriquer du fromage. C'est en octobre qu'il fut embauché
comme menuisier dans son village. Il le resta jusqu'à
juin 1941, ce qui permit d'assurer sa subsistance.
Allez lire Jean
Bruller menuisier sous l'Occupation.
Jusqu'en juin
1941, Jean Bruller profita de son jour de congé - le
jeudi - pour se rendre à Paris afin de rencontrer ses
amis et sa mère, et de participer à la Résistance.
Allez lire son aventure clandestine des Editions
de Minuit.
Lorsqu'il mit en place et coordonna
les Editions de Minuit, il resta souvent quelques jours
par semaine à Paris. Il lui arriva également de ne pas
se rendre à Paris chaque semaine. Nous en avons une
idée précise grâce à son journal intime de 1942. Ce
dernier s'étale sur 2 mois et demi, entre mi-octobre
et fin décembre.
Ainsi il se rendit à Paris le jeudi
15 octobre 1942, mais ne revint à Villiers-sur-Morin
que le lundi 19 à cause de nombreux rendez-vous programmés
dans la capitale. En revanche, accaparé par ses illustrations
de Hamlet, il s'attela à cette tâche ardue
le mardi 20 octobre et resta chez lui à travailler jusqu'au
lundi 26. Ce n'est que le mercredi 28 octobre qu'il
retourna en train à Paris, pour ne revenir à Villiers
que le samedi 31. Et, l'on apprend qu'au moins pendant
15 jours il fut sédentaire. Obnubilé par son travail
artistique sur Hamlet, par ses hésitations et
ses impossibillités à avancer, il resta à Villiers.
Le samedi 31 il ne fit que contempler ses quelques dessins
sans les travailler. Le lendemain, il procéda à quelques
corrections. Le lundi 2 novembre, il partit travailler
de l'atelier à la chambre bleue de sa maison. Et le
jeudi 5 novembre, jour habituel de son départ pour Paris,
il préféra continuer son travail sur Hamlet,
et ce, jusqu'au lundi 9 novembre. Le jeudi 12 novembre,
le diariste évoque le climat froid de Villiers. Est-il
entre-temps parti dans la capitale? Rien ne le stipule.
De la mi-novembre à la fin décembre,
le moral de Jean Bruller est en berne. Aussi délaissa-t-il
son journal. Ce dernier reprend le samedi 28 novembre
après une dépression de 15 jours. Pierre
de Lescure lui rendit un verdict sévère au
sujet de son travail sur Hamlet, ce qui ruina
4 mois de travail. Jean Bruller évoque sa venue à Paris
le mardi 2 décembre et son départ du 4 décembre. Il
emporta avec lui ses nouveaux dessins que Pierre de
Lescure apprécia.
Il n'écrivit pratiquement plus son
journal jusqu'au lundi 28 décembre, puis l'abandonna
définitivement. Toutefois, ce bref journal permet de
comprendre que, jusqu'en 1944, Jean Bruller alla régulièrement
à Paris pour ses activités clandestines, mais de manière
moins rigide qu'il ne le dit en tant que mémorialiste.
Certes, il se rendit à Paris essentiellement le jeudi,
mais ce ne fut pas aussi automatique qu'il le dit: "Deux
jours à Paris pour diriger les éditions, cinq jours
à la campagne pour mon travail d'illustrateur".
Jean Bruller interrompit ses allers-retours
de Villiers-sur-Morin à Paris en allant en zone sud.
En juillet 1942, il réussit à obtenir une autorisation
grâce à Jean Chazal, nommé juge d'instruction à Nevers.
Il passa par Nevers pour rencontrer son ami, puis se
rendit le lendemain à Lyon où il rencontra une des soeurs
d'Yvonne
Paraf, pour la diffusion du Silence
de la mer en zone sud. Il alla ensuite
voir les Martin-Chauffier et Claude Aveline à Collonges-au-Mont-d'Or,
puis partit pour Grenoble rencontrer les Battail, instituteurs,
ceux-là même qui lui avaient proposé de l'héberger avec
sa famille dès l'été 1940. Le lendemain, Bruller vit
le fils de Pierre de Lescure, et Paul Hartmann,
son éditeur principal de l'entre-deux-guerres. Ce dernier
lui remit un exemplaire d'A travers le désastre de
Jacques Maritain, un des futurs volumes des Editions
de Minuit. Hélas, Bruller ne ramena pas l'exemplaire
à Paris parce qu'à Marseille il commit l'erreur de le
prêter à un ancien camarade d'école qui disparut
avec.
A Valence, Jean Bruller prit le train
pour Marseille. Il eut le plaisir le revoir Paul
Silva-Coronel et son épouse, ainsi que plusieurs
autres amis dont le Docteur Jean Dalsace et la famille
de Stéphanie son amour de jeunesse. Roger Martin du
Gard, à qui Bruller avait écrit pour le rencontrer à
Nice, déclina sa proposition. De retour à Lyon, il vit
de nouveau Claude Aveline qui devait prendre contact
avec Paul Hartmann pour qu'un deuxième exemplaire d'A
travers le désastre puisse être remis à la sœur
d'Yvonne Paraf ultérieurement. C'est Yvonne Paraf qui
ramena de la zone sud cet exemplaire caché dans
la doublure de sa trousse de toilette, à la fin du mois
de septembre 1942.
Article mis en ligne le 1er juin
2018
Article mis en ligne le 1er 2018
|